Question de danse 2017

CRÉATION VERSUS IMPLOSION ET SI …

Le monde se durcit. Nombre d’axiomes sur lesquels reposent les sociétés occidentales, rattrapés par leur obsolescence, se troublent désormais dans le spectre déployé d’une information multipliée, où le réel des points de vue discordants, déjà générateur de tension, le dispute au toxique, aussi abondant que malveillant. Migration, ostracisme, conquête, possession, profusion, climat… Si la vie n’a d’autre option que de se perpétuer, hommes et femmes portent la responsabilité de sa qualité : ils détiennent le pouvoir et donc le choix d’être guerriers ou pacifiques, clivants ou accueillants, autocentrés ou responsables. L’affaissement d’une vision vertueuse par laquelle la culture a pu s’envisager en dynamique ascendante de l’esprit humain entretient la sensation diffuse et effarante d’un recul de civilisation… 

L’une des toutes premières mesures de Nelson Mandela, président d’une Afrique du Sud historiquement fracturée, fut, dès son élection en 1994, d’édifier de nouveaux espaces publics, culturels, sportifs et commerciaux, afin que tous y pénètrent en même temps. Il s’agissait bien d’engendrer un nouveau ferment commun, pour favoriser l’avènement d’une soudure sociétale inédite. 

Et si l’acte de création (re)prenait ce rôle ? Si, par l’actualisation incessante de ses lectures du monde, l’Art et ses créations agissaient en vitamine collective d’une énergie positive ? Si nous étions convaincus que découvrir ensemble une oeuvre et le processus de son émergence alimentait un esprit respectueux, voire amoureux de la diversité, une diversité des êtres, des chemins et des idées, une diversité devenue valeur fédératrice plutôt que source de phobie… 

De la douzième édition de Question de danse transpire une intuition tellurique de nombre d’artistes. Ils nous disent que pour inventer demain, il faut relier le présent à son passé, par la création, une création en conscience de ses origines pour être apte à s’en affranchir, une création artistique diverse pour conforter les fondations d’un futur pluriel pacifique : une culture par la dynamique, vivante, le gage de l’entente


Michel Kelemenis